Cynthia, la tornade blonde.
(Miss Météo, collage perso, 1988)
Quelque part entre les romans à l'eau de gare et les Editions Baldaquin, Fictions Pulpeuses revient sur ces tranches de vie souvent très mal écrites, et où vous vous êtes parfois fait un film.
Et aujourd'hui, découvrons comment dans le monde des médias, la popularité et la reconnaissance ne tiennent parfois qu'à un fil...
Août 2018 en Floride. 28° pour température minimale. Enormément de précipitations pour un été précisément pourri.
Cynthia Jacquard (de son vrai nom Rhonda Pickett) est Miss Météo sur une chaîne de télévision locale en Floride. Elle est remplaçante et assure généralement les bulletins de la nuit et du weekend pendant l'année. Les prime times, c'est uniquement pendant les vacances, quand les titulaires se dorent la pilule ailleurs qu'en Floride...
Ancienne première dauphine de Miss Orlando, elle est ambitieuse, et rêve désespérément de passer un jour titulaire, pour pouvoir elle aussi un jour partir en vacances en Europe au mois d'Août. Parce qu'entre la chaleur suffocante , l'humidité maximale et les averses orageuses, non seulement Cynthia étouffe dans son petit studio à caméras télécommandées, mais sa popularité chute tandis que les températures ne cessent de grimper.
Le soir, après le boulot, elle rentre dans son petit studio à elle, et rêve d'une villa où un jeune employé à la peau mate nettoierait la piscine en lui faisait de l'oeil.
Elle a déjà pensé à tout:
- Elle a regardé le film To die for (Prête à tout) au moins cinq fois, mais ne peut se résoudre au crime.
- Elle a pensé migrer en Alaska où là au moins, le ciel est plombé 364 jours par an (il paraît en effet qu'il y a un jour où il fait moins moche).
- Elle a pensé à lâcher l'affaire pour accepter un job de Cendrillon à Disneyland mais elle est trop grande pour le costume (et elle chausse du 41).
Sa carrière de mannequin beachwear est derrière elle, les tempêtes et les tornades sont devant.
Le lendemain matin, elle boit son lait de soja, et choisit sa tenue pour avoir un bulletin passable.
- Je vais mettre du clair ça va faire plus lumineux, se dit-elle en sortant un joli chemisier de soie ivoire.
Mais pas de chance, l'un des boutons menace de céder. Elle s'empresse d'aller chercher son nécessaire de couture à la salle de bain, mais sur les 2, 50 mètres qui séparent son lit du lavabo, elle continue de ruminer sur son futur sans éclaircie. Elle ouvre l'armoire à glace et soudain aveuglée par un reflet de lumière électrique sur le miroir, elle reprend espoir dans des jours meilleurs, en pensant que ces compétences (elle est diplômée en cours du soir de Météorologie) finiront bien par être reconnus.
Elle reprise à la hâte le bouton de son chemisier, car elle risque d'arriver en retard pour le premier bulletin de 6 h du matin.
La journée est maussade, et les rêves de Cynthia semblent une nouvelle fois évaporés avec la chaleur.
Pire, elle se surprend à parler au ventilateur:
- Toi au moins, tu ne te pose pas autant de questions que moi, tu tournes et puis c'est tout.
- Cyn' c'est bientôt à toi pour le bulletin de 20h! dit la voix métallique dans la vielle enceinte murale de sa loge.
C'est donc avec des pieds de plombs qu'elle s'enferme dans sa geôle télévisuelle, petite boite étouffante avec fond vert et caméra automatique.
- Nous rejoignons tout de suite Cynthia pour un point météo, et apparemment ça ne s'arrange pas trop pour le weekend, n'est ce pas Cynthia?
- Ecoutez pas vraiment Anderson, mais il faut rester optimiste, une éclaircie est toujours possible...
D'un mouvement à la fois presque mécanique et chorégraphique elle enclenche l'animation satellite d'une main et s'arrête à montrer la progression de la dépression nerveuse en levant son bras droit.
Mais à cet instant précis, le fil du bouton mal recousu cède, laissant entrevoir un peu de son sein gauche (même un soutien couleur chair eût été disgracieux sous le chemisier fluide).
Cynthia tente de cacher sa poitrine, les cartes s'affolent sous la pression de ses doigts.
- Effectivement, avec vous Cynthia tous les espoirs sont permis! lance le toujours très spirituel (et très gay) présentateur joker du journal.
Cynthia éclate alors de rire, laissant entrevoir son sourire qui inonde de lumière le ciel remplit de nuages de synthèse.
- Une chose est sûre, Cynthia, demain dans la presse on ne parlera pas que de la pluie et du beau temps...
Et en effet, les images font depuis le tour du monde dans tous les bêtisiers de printemps, d'été, d'automne et bien entendu de Noël.
Ce fût en effet un cadeau pour Cynthia dont la cote de popularité est montée en flèche et qui en plus de son bulletin météo en tant que titulaire dès la rentrée, s'est vu attribuer une chronique hebdomadaire dans la matinale, où elle explique comment résoudre des petits problèmes du quotidien.
Le nom de sa rubrique: Cynthia est optimiste.
Elle n'a toujours pas de villa, mais vient d'emménager dans un trois pièces avec Joaquin, son boyfriend qu'elle a rencontré à la plage par un jour de beau temps, et qui dirige sa propre entreprise d'entretien de piscines. Et elle ne planifie pas son meurtre pour faire encore progresser sa carrière.
Par contre, elle a lancé sa propre marque de chemises en soie, et à l'automne devrait sortir son premier parfum: Tornade. En français, puisqu'elle fait régulièrement des voyages en amoureux dans la ville lumière, où elle trouve d'ailleurs qu'il peut un peu trop souvent...
L'avis du Flamand Rose: Je déteste la Floride quand il y pleut, c'est pour ça que je suis un oiseau migrateur. En plus, c'est pas pour dire, mais Miami, c'est quand même blindé de dindes...
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