"Merde, la pub, on va tout rater!" s'écrie Roger à Maman.
La télé rend-elle flou?
On est en droit de se poser sérieusement la question.
Et le traitement des chaînes d'info dans l'affaire DSK n'en est qu'un exemple édifiant.
Parce qu'à force de vouloir être précis, on finit par brouiller les pistes (et l'image).
Et l'intérêt des chaînes dans cette histoire n'est pas toujours très net.
Une mise au point s'impose sur ce flou journalistique...
Hier, pour cinq minutes d'audience, cinq heures de direct.
Genre, j'exagère à peine.
Je ne reviendrai pas sur les incidents d'hier, déjà largement relayés par la presse aujourd'hui.
Si? Rapido alors.
1. La Petite Maison dans le Quartier des Abattoirs:
Alors que cela fait des heures qu'on guette la porte de la résidence colorée de DSK, les chaînes d'info balancent de concert une page de pub et loupent à l'unisson LE moment tant attendu.
C'est un peu comme si on ratait l'instant où, dans "La Petite Maison dans la Prairie", Charles Ingalls rentre en lançant un canadien et viril "Dites donc, ça sent rudement bon ici!" et que Caroline Ingalls lui répond tout sourire colgate qu'elle a fait du ragoût de castor pour le dîner. Celui là même que Laura a pêché dans l'épisode précédent.
Bref, c'est ballot.
2. "Not Guilty".
L'image qu'on attendait depuis des heures, le dialogue déjà culte, la phrase du jour, le moment crucial, bref le moment ou le prévenu doit annoncer (sans surprise) qu'il plaide non coupable, eh ben... on l'a pas, parce que la caméra n'était pas prête.
C'est un peu comme si, dans un épisode des "Experts, Manhattan", on ratait le moment de l'ultime reconstitution où on comprend qu'en fait ce n'était pas l'adn d'un castor, mais celui du manteau de fourrure de la femme bafouée.
Bref, it's ballot.
Mais ça ne s'arrête pas là.
Car, comme je l'ai dit, à force de vouloir être précis, à force de vouloir être rapide surtout, on finit par raconter à peu près tout et n'importe quoi.
Et on a pour ça un outil sacrement efficace.
3. To tweet or not to tweet?
Anne Sinclair est entrée dans la salle (sans blague, elle n'est pas allée boire un verre à la cafétéria?)
Au premier rang, juste devant nous, les journalistes (sans blague, pas tout derrière avec le sergent Mac Flurry?).
En studio, c'est pareil, on balance de l'info:
Elle porte un tailleur sombre (sans blague, elle a pas mis sa robe à fleurs?).
Quelle couleur? Noir ou bleu marine? Quelle matière? Quelle taille? Quelle marque?
Soyez fù€£!<& plus précis, parce que nous, pauvres spectateurs novices quant aux procédures juridiques, qui plus est aux States, on est dans le flou le plus total, on arrive pas à suivre.
Nous, on est myopes et daltoniens.
Et ça c'est ballot de chez ballot&sons.
Par contre un chose est sûre, ce sont bien des femmes de ménage arrivées en car qui crient "shame on you", c'est à dire honte à vous (c'est en vo sous-titrée).
Et on se repasse indéfiniment ces images d'une grande classe (je ne prends pas ici parti, je dis juste que l'humiliation, on l'a bien saisie au premier passage).
Parce que de toutes façons on a pas mieux que ça à se mettre sous la dent pour l'instant (le castor mijote toujours).
4. Retour à Tribeca:
Et le meilleur reste pour la fin, lorsque, alors que toutes les caméras sont toujours en place devant la maison pour le retour de couple, patatras!
La voiture noire est INTROUVABLE.
On a cherché partout dans NY, chez l'avocat, chez le docteur, au pressing, chez votre marchand de journaux, rien rien rien, on ose à peine le dire, DSK a disparu!
Note à la prod: la prochaine fois, prévoir un hélico qui suive à la trace le véhicule, et si on y arrive, on pirate le gps, on soudoie la compagnie pour tracer le bracelet électronique, et on fouille dans les poubelles pour connaître la marque du tailleur sombre.
Du coup, on a re droit à la façade colorée et déserte comme un décor des "Mystères de L'Ouest", au moment où James West pénètre dans la ville fantôme, qui est en réalité un décor de carton pâte construit à la hâte par les hommes de main de Miguelito Loveless, qui lui a déjà pris la poudre d'escampette.
Et ça, c'est ballot, again & again.
Bref sale journée pour tous ceux qui se mobilisent pour nous fournir une information aussi précise que microscopique.
Vivement la prochaine audience, qu'on rectifie le tir, et qu'on bouffe enfin du castor.
Loin de moi l'idée (pour rappel suis myope) de vouloir faire ici le procès trop facile et expéditif des médias en général dans cette affaire déjà très triste.
Il y des vrais pros partout, c'est incontestable.
Mais je ne peux néanmoins m'empêcher de penser qu'il serait très tentant pour certains, qui croient vivre ici le moment de leur carrière, tandis que certaines personnes, elles, jouent leur vie, qu'il serait très tentant donc de verser dans la caricature.
C'est pourquoi je me permets d'en rajouter un peu.
Histoire que les couleurs soient visibles à l'oeil nu.
Et myope.
Du coup, la prochaine fois je lirai les journaux du lendemain, pour prendre un peu plus de recul.
On en reparle après la pub...
