Certes, je l'ai déjà dit , mais quand on est pas en avance, on finit toujours par être en retard.
Et par avoir un petit creux.
Et c'est dans ces jours là, notamment, qu'on mange le nec plus ultra-rapide du repas pris en quatrième vitesse :
Le Croque Monsieur...
Pour rappel, et pour tous les lecteurs qui vivent hors d'Europe et/ou hors du temps, un Croque Monsieur est un sandwich chaud avec du jambon et du fromage.
Pour le Croque Madame , rajoutez un oeuf.
Pour le Croque Mademoiselle, mangez juste la feuille de salade qui agonise sur sur le coin de l'assiette.
Sans oublier le fameux ketchup: l'exhausteur de pas de goût du tout.
Bref un repas simple et équilibré pourvu qu'on le mange assez vite pour ne pas trop y penser.
Le parfait en-cas à manger "sur le pouce".
On nous prend vraiment pour des cons.
Qui a jamais mangé quoi que ce soit sur son pouce?
J'ai cherché sur le net, juste pour rire:
"L'expression "manger sur le pouce" est apparue au XIXe siècle et renvoie certainement au pouce que l'on utilise beaucoup lorsque l'on manie un couteau et des tranches de pain, autrement dit lorsque l'on prend un repas rapide."
Waow. Celui qui a trouvé ça a dû en bouffer beaucoup des croques pendant ces longues années de recherches.
Et il n'a pas ménagé ses efforts pour nous torcher cette définition.
Et il a dû se ronger les ongles.
Thumbs up! (ça veut dire:pouces en l'air).
Moi je dis qu'il y avait de très mauvais bloggers au dix-neuvième siècle et que l'un d'entre eux a dû faire une inside joke que même lui ne comprenait qu'à moitié.
Aux mauvaises langues: je n'étais pas né, et reprenez donc une bouchée de votre Croque.
Mais revenons à nos cornichons.
On ne choisit pas de manger un croque.
On ne dit pas: je meurs d'envie d'un croque.
Enfin, sauf quand on a un ami qui s'appelle Fred et qui fait les meilleurs croques du système solaire.
On choisit donc un croque parce qu'on a pas le temps, ou parce qu'on a pas très faim, ou qu'on a pas trop de sous au resto qui fait déjà un "bon vieux croque à 15 euros".
C'est ça ou la vichyssoise à 13 (ça veut dire soupe très froide et très chère).
Et pourtant: un bon croque, c'est bon (merci Fabrice).
Mais une fois écoulées les deux minutes trente six secondes qu'il m'a fallu pour dévorer Monsieur (je n'aime pas trop les oeufs, et la salade a été déclarée cliniquement morte à 13h 08' ), le sentiment qui prédomine est "post croqum, animal triste".
Parce qu'en vérité, un repas, c'est un peu comme un voyage, en ce qui me concerne.
Quand ça va trop vite, ça me laisse sur ma faim, je ne suis pas dépaysé et j'ai le sentiment de ne pas avoir bougé... d'un pouce.
Comment repartir d'un bon orteil, quand on a pas l'impression d'avoir fait une vraie escale, fut-ce au relais de la gare?
N'en va-t-il pas de même pour beaucoup de choses, que nous expédions faute de temps, faute de mieux, ou d'appétit, ou simplement parce qu'on est rattrapé par le train-train de 12H 53?
Si on ne peux pas se payer tous les jours le dîner gastronomique, doit on se contenter pour autant d'un pansement gastrique?
A quelle heure est mon déjeuner avec Carrie Bradshaw?
Y-a-t-il une vie après le Croque Monsieur?
Le parallèle honteux que je viens de faire entre ce finalement délicieux en-cas et une certaine forme de résignation face à une surcharge pondérale de soucis est sans doute maladroit, mais c'est parce que justement, je refuse toute idée de renoncement, et de ronflement (qui peut être causé par le surpoids sus-nommé).
Et merde, les plaisirs de la chair, ç'est quand même un des plus chouettes trucs ici-bas.
L'évasion n'a pas de prix, le rêve n'est pas à 15, 10, ou même 8 euros à la carte.
Et tandis que je trempais mon doigt pour porter à ma bouche les derniers sillons de ketchup, histoire de réanimer mes papilles gustatives plongées dans un coma profond, je rêvais de soleil, de vagues, de mojitos et d'ananas frais.
Quand j'eu soudain une révélation:
C'est donc pour ça qu'ils ont créé le Croque Hawaii...
