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2019-10-03

Même pas vu: Why women kill ou la Villa Cluedo.



Welcome home, honey.

En fait c'est simple comme bonjour:  Marc Cherry a regardé le film The Hours, il s'est endormi devant, et il a mélangé dans un rêve le tout avec Desperate Housewives, la série qui l'a rendu riche et célèbre, et qui a connu un tel succès planétaire qu'il court après depuis désespérément, justement.

Oui, sauf que ce n'est pas si simple en réalité, car la série Why women kill, semble elle aussi prête à connaître une vie de rêve...


Mysteria Lane:

Sur le papier, donc, on pourrait être irrité d'emblée par le côté gros de l'arnaque, tant les points communs avec Desperate Housewives sont flagrants de délits d'auto-plagiat.
Et on ne parle même pas du style Murder Mystery, usé jusqu'à la corde dans la bibliothèque.

Un quartier apparemment tranquille des suburbs, pas un suicide, mais trois meurtres, qui ont donc pour particularité de se situer dans la même villa mais à des époques différentes.
Trois femmes donc (et pas quatre, quoique vous allez voir)  qui s'apprêtent donc semble-t-il à commettre l'irréparable:

Beth-Ann, épouse modèle tout droit sortie des magazines de savoir vivre des années soixante,  au mari imbuvable de machisme qui la trompe avec une "vulgaire" serveuse, et dont la rousseur et le lissage des manières rappelle un peu Bree Van De camp, mais version naïve et gentille. Rousse  aussi comme Juliane Moore dans The Hours, donc.

Simone, femme des années 80, libérée et mondaine, qui collectionne les oeuvres d'art dans sa galerie et les maris aussi, dont le dernier, très british et très gay, la trompe avec son ancien coiffeur. Elle se venge donc en sortant ses griffes de cougar, en jetant son dévolu sur le fils de sa meilleure amie. vous avez dit Gabrielle Solis?

Taylor, avocate pugnace et indépendante, juste dans le mariage libre qu'elle forme avec son scénariste de mari, afin de pouvoir vivre tranquillement en 2019 sa bisexualité en toute quiétude. Son mari, ancien toxicomane, n'arrive pas à pondre de nouveau chef d'oeuvre et c'est donc Madame qui ramène les oeufs dans le panier, et porte la culotte (sauf quand elle voit sa maîtresse évidemment). Comme un petit air de Lynette...

Rajoutez quelques voisins plus ou moins savoureux ou encombrants, il ne manque plus que les glycines, et on s'y croirait.
Et dès le générique, lui aussi en animation (tiens, donc?)  on s'attend à être très énervés par la supercherie.


La Villa Cluedo:

Oui, sauf que ces ingrédients connus, non seulement ne semble pas être périmés, mais sont toujours aussi efficaces dans la machine implacable de Cherry. Ce qui est vrai ne l'est plus la seconde après, ce qui est féroce devient attendrissant à l'instant suivant, ce qui est burlesque devient aussitôt tragique, et l'inverse est également vrai, ou faux, c'est selon.

S'ajoute une ou deux vraies trouvailles: L'unité de lieu, chère à la tragédie classique, mais pas de temps. La maison est un théâtre et un personnage à part entière dans l'intrigue.
On navigue visuellement en permanence entre les sixties rose bonbon, les golden eighties extravagantes, et les... jours un peu taupe et ternes de cette fin de décade 2010.

Autre vraie bonne idée: le fait qu'on connaisse (ou qu'on croit connaitre) la fin. Le spectateur détective du dimanche est maintenu dans une perpétuelle recherche d'indices, de mobiles, de victimes présumées ou de coupables désignés, qui le tiennent en haleine, pour ne pas dire en laisse devant la façade de la villa maudite.

Le vrai point fort de Marc Cherry  étant sa capacité à développer les personnages, spécialement féminins, en réservant ses rebondissements comme des vengeances qu'on servirait à froid:
L'émancipation de Beth-Ann, bien qu'attendue, est délicieusement savoureuse, les frasques de Simone sont à hurler de rire, et les galères de Taylor sont touchantes.

Mais toutes ces bonnes intentions s'envoleraient en fumée de  feu ouvert, sans le casting, lui aussi à la hauteur des événements sus-mentionnés. Car encore une fois, à la lecture, le pari est risqué.


7 à la maison (au moins):

Ginnifer Goodwin (vue notamment en Blanche neige dans le consternant Once upon a time) excelle ici en fausse godiche / potiche/ pouliche bien dressée par Sam Jaeger, son oeil malicieux apporte à la femme au foyer  désespérée tout son charme, et certaines scènes de Beth-Ann, comme celle du dîner chez le patron sous space cake seront bientôt cultes.

Lucy Liu, qu'on savait déjà hilarante de répartie au couteau bien aiguisé, a ici une partition sur mesure à jouer en virtuose, ses tenues tout droit sorties de Dynastie, son sens inné du vaudeville, et le duo parfait qu'elle forme avec son mari ultra brushé Jack Davenport font dire qu'elle a bien fait de signer son contrat. Du sur mesure à la mesure de sa démesure. Du pince sans rire hilarant.  Et toujours ces regards mutins qui en disent encore plus long que toutes ses meilleures répliques.


Kirby Howell- Baptiste campe l'avocate dont la juste balance oscille entre son mari #boulet Reid Scott, et son amante Alexandra Daddario , avec toute la détermination d'un colosse aux pieds d'argile.
Bien que son rôle soit moins axé sur la comédie pure et donc moins payant à la base, elle réussit le tour de force de ne pas se faire détestée d'emblée pour le manque de rigueur de son personnage dans la gestion de ses dossiers privés.

C'est cette dernière époque, la nôtre, et donc la moins facile à caricaturer qui nous réservera peut-être les meilleures surprises scénaristiques, vu que justement le mari écrit pour le cinéma. Quelque soit les couples ou le trouple, on est certains qu'il y a encore nombre de squelettes dans les placards.

Sadie Calvino en pas si bête serveuse,  Leo Howard en amoureux vous offre une swatch, Katie Finneran en amie bien pensante mais peu clairvoyante, et une mention spéciale à Alicia Coppola en voisine de bon conseil maffieux, complètent le casting bien senti, tout chaud sorti du four, ou tout frais sorti de la morgue, c'est selon.

Car on ne sait toujours pas vraiment qui va nous quitter à la fin de la première saison, en espérant évidemment que ce ne soit pas la série qui nous quitte prématurément.

Qui vivra, verra.
Ou plutôt: Que sera, sera... Whatever will be, will be...



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